{COLLAB} Sweet Morning

La sicilienne le salua dans sa langue natale, enrobée de miel, de cannelle et de soleil. Avait-il bien dormi ? Qu'il prenne garde, son réveil s'annonçait affreusement dur, et il y avait un risque pour qu'il ne s'en remettre jamais. Après l'avoir averti, espérant que son estomac en vaudrait deux, la chatte blanche ouvrit le coffre aux douceurs. Il lui répondit en bulgare d'une voix pâteuse mais bien moins lourde que jadis lors de la précédente journée. Il raconta des tas de choses qu'elle pouvait comprendre mais pas avec les mots, puis reprit dans un français accentué que ses oripeaux n'étaient peut-être pas assortis à ce charmant plateau, ni à cette jolie fleur qui ne daignait pas se vêtir de carrés carrelés pour rester dans son sillage car il ne fallait pas se mystifier, c'étaient les roses qui s'habillaient comme lui. Helly lui demanda d'être indulgent, de ne pas se froisser, mais elle avait parcouru le monde ce matin et sur aucun continent elle ne trouva de fleur carrelée. Elle avait été obligée de faire avec les moyens du bord, et même si ce n'était pas grand chose, il restait ces gâteaux du nord. Le sorcier assura qu'avec la génétique, on pouvait certainement faire des plantes en peau de kilt, mais ça ne faisait rien, il aimait bien ce rouge au naturel, et c'était peut-être la première fois de sa vie qu'on lui offrait un tel présent au réveil aussi, les pommettes aussi colorées que la corolle, il ajouta que ça lui faisait très plaisir, et sans doute même un peu plus.

Il rougissait ? Alors, cette fois-ci, c'était lui qui s'accordait aux roses. Le dangereux végétal entre ses doigts révélait toute sa splendeur au croisement de quelques rayons ambrés. Il suffisait parfois d'un rien pour que les belles choses se révèlent. Un geste, un regard, une attention. […] L'attrait du Rouge prenait tant et tant de formes... celle-ci était la plus belle, déraison végétale d'un chat sauvage qui avait décidé d'être sage. Ni domestique, ni de salon, le slave tenait entre ses mains la litote de sa passion. Viktor arracha son regard du petit tutu qui rougissait de le voir rougir doux pour chercher l'indigo zinzolin qui le zieutait. Il murmura un petit merci. C'est tout. Ça ne pouvait avoir l'air de rien un merci sans emphase, mais quand on savait que les mots n'étaient pas gratuits, quand on savait qu'on ne parlait pas pour rien dire, alors cette exclamation soufflée du bout des lèvres signifiait tout ce qu'elle avait à signifier, et si ça n'était pas suffisant, le ton le confirmait.

Et c'était avec toute la simplicité d'une complice matinée qu'ils prirent leur petit déjeuner.

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